vendredi 27 janvier 2012

Tout le monde veut prendre sa place !

Réchauffons le slogan utilisé par l'émission le petit journal, sur Canal+ (en référence à une émission de divertissement), pour évoquer la course à l’Élysée, "Tout le monde veut prendre sa place". Il en est de même pour Obama, qui va devoir faire preuve d'une certaine ingéniosité, pour conserver sa place à la Maison-Blanche.

De nombreux candidats (peut-être même un peu trop) se sont déclarés challenger potentiels. Si bien que, comme le souligne Frédérick Gagnon, il y a eu des candidatures pour le moins singulières avec des personnages pas tout à fait "sûrs de ce qu'ils pensent". Ce qui rend les primaires républicaines assez amusantes à suivre, où, telle une sitcom, on a hâte de connaître les prochains rebondissements, même si, les candidats manquent cruellement de saveur.
La course à l'investiture se poursuit. Après le caucus en Iowa le 3 janvier dernier, les primaires du New Hampshire, le 10 janvier, et la Caroline du Sud le 21 janvier, la Floride est le prochain rendez-vous à ne pas manquer.

En effet, le 31 janvier prochain, la bataille va se jouer (pour l'essentiel), entre Mitt Romney, grand favori, et Newt Gingrich qui a remporté les primaires dans l’État très conservateur de la Caroline du Sud. Santorum serait, selon les sondages, moins bien placé pour espérer la victoire. Ron Paul, quant à lui, préfère se concentrer sur le prochain État en jeu, à savoir le Nevada.
Comme le précise Élisabeth Vallet, la Floride est une étape importante, dans les primaires républicaines. En effet, ce vaste État compte près de 20 millions d'habitants, dont 22,5% d'Hispaniques, et 17,3% de retraités. Le chômage atteint le chiffre alarmant de 9,9% soit un point de plus que la moyenne nationale. De plus, la grande diversité de l'électorat rend la tâche difficile aux candidats, dans l'élaboration de leurs thèmes de campagne. Cependant, dans l’État de l'orange, ce sont des primaires fermées, c'est-à-dire que seuls les électeurs enregistrés comme républicains sont invités à voter. Par conséquent, les conservateurs peuvent espérer remporter des voix supplémentaires. Même si le sort n'est pas scellé à la suite de ces élections, la règle du winner-take-all attribue au candidat vainqueur,  les 50 grands électeurs de cet État. Ainsi, dès mercredi prochain, nous aurons une vision plus précise des candidats réellement susceptibles de remporter l'investiture républicaine.

Pour comprendre l'enjeu de ces primaires, il faut d'abord saisir leur importance stratégique pour les candidats. Ce sont des élections locales, État par État, ce qui signifie des préoccupations différentes. Les candidats doivent adapter leurs discours en fonction  à la fois de l'électorat visé, mais également selon le style de vote (ouvert ou fermé) en vigueur dans l’État concerné, qui est indépendant et libre d'organiser les primaires comme il le souhaite. (pour une analyse plus détaillée, voir le lien ici, de l'interview de Donald Cuccioletta).
Quant à Obama, même s'il se trouve aujourd'hui dans une situation difficile et défavorable (taux d'approbation très faible 45%, une économie au ralenti, un taux de chômage qui peine à fléchir, un contexte international délicat avec la crise en Europe, des bouleversements politiques en Corée du Nord et au Proche-Orient, la recrudescence de la Russie sur la scène internationale,...), il semblerait que le président parvienne à sortir son épingle du jeu. On l'attendait avec impatience le traditionnel discours du "State of the Union"qui , cette année, lance officiellement la campagne d'Obama pour 2012. Afin de tirer à son avantage le contexte morose actuel, il affirme vouloir aller de l'avant dans ses réformes. Il appelle à une plus grande justice sociale, économique et fiscale affirmant vouloir redorer le blason de la GRANDE Amérique:"America is back".  Il place la relance de l'industrie et l'emploi au centre de sa campagne. Il veut taxer les plus hauts revenus, augmenter les impôts des plus grosses sociétés, lutter contre les délocalisations afin de rapatrier l'emploi sur le sol américain. Mais le titre même de son discours est révélateur : "An America built to last", aucune révolution s'annonce à l'horizon.  Il s'agit plus de continuité, que de changement. Avec seulement 45% d'avis favorable, c'est un pari assez risqué.

Les adversaires d'Obama dénoncent l’inefficacité de sa politique. Mais, malgré les critiques  envers le président, le GOP peine à affirmer un programme alternatif efficace qui serait soutenu par un candidat faisant l'unanimité. Au contraire, les primaires républicaines reflètent un parti divisé, où il s'agit de choisir, non pas le meilleur candidat, mais le moins pire. Mitt Romney semble le seul capable d'affronter Obama. Mais l'ancien gouverneur du Massachusetts ne fait pas consensus au sein de son parti. Issu de l'église mormone, il est bien souvent accusé d'être trop modéré sur les questions morales et religieuses. En effet, Romney défend un conservatisme économique et se montre plus ouvert sur les questions sociales, comme l'illustre l'adoption durant son mandat de gouverneur d'une assurance de santé quasi universelle aux résidents du Massachusetts. Ironiquement celui qui s'est entouré d'anciens membres de l'équipe de campagne de George W Bush semble changer d'avis comme de chemise, en fonction du contexte du moment. N'est-ce pas sur ce créneau que cette fameuse équipe a discrédité John Kerry en 2004 avec ce slogan publicitaire "Windsurfing" .... Affaire à suivre !
Soyons mauvaise langue: l'alternative Obama se résume pour le moment, à une girouette mormone, où à un ultra conservateur divorcé, qui rêve de coloniser la lune .... hum, ça promet !

Pour une vision extrêmement claire et précise des élections de 2012, je vous réfère à cette analyse tout à fait pertinente réalisée par Charles-Philippe David et Frédérick Gagnon, qui vous présente en détail les enjeux déterminants de cette campagne. Sans oublier l'ouvrage de d’Élisabeth Vallet et Karine Prémont "Elections présidentielles américaines 2012".

AE