L’avènement
en 2010 du Tea Party a consacré le retour
fulgurant des conservatismes social et fiscal poussant toujours plus à droite
le Parti républicain. Les gains considérables de sièges au Congrès réalisés ces
dernières années par le Grand Old Party rendent
compte de l’influence indéniable des conservateurs sur la définition de la
politique nationale américaine. En 2012, une pluralité d’Américains (38%) se définissaient comme
conservateurs (contre 34% pour les libéraux).
Le
conservatisme n’est pas un phénomène exclusivement blanc. 33% des Afro-Américains
affirment ainsi être proches des idées conservatrices. Ce chiffre, bien qu’il
puisse paraître curieux (compte-tenu de l’appui massif des Noirs pour le Parti
démocrate), s’explique en grande partie par le fait que les Afro-Américains
représentent le groupe ethnique le plus croyant et le plus pratiquant aux États-Unis.
En effet, 79% d’entre eux accordent une place importante
à la religion dans leur vie quotidienne. Alors que 37% des Américains déclarent
se rendre à l’office au moins une fois par semaine, ce chiffre s’élève à 53%
chez les Afro-Américains. 76% des Noirs affirment prier au moins une fois par
jour contre 58% pour le reste de la population.
Ainsi, en instrumentalisant les valeurs chères
aux Afro-Américains comme la place de la religion dans la société, l’opposition
à l’avortement et au mariage gai, des élites politiques noires conservatrices
parviennent à sensibiliser une partie de cet électorat (et à l’amener à appuyer
le Parti républicain). Stratégie qui pourrait s’avérer payante non seulement
pour le 4 novembre prochain mais également pour les présidentielles de 2016.
Déjà en 2012, un nombre record
d’Afro-Américains (72) étaient en course pour remporter un siège sur Capitol Hill. Ce
nombre explose cette année avec 83 candidats issus de la communauté noire, soit
65 démocrates et 18 républicains. Parmi ces candidatures républicaines, trois retiennent
particulièrement notre attention.
Tim
Scott
source :https: www.scgop.com |
Sénateur de la Caroline du Sud, il est en élection
cette année afin de conserver le siège dont il a hérité en 2013 après la
démission du républicain Jim DeMint, aujourd’hui à la tête de la Heritage Foundation, un influent think tank conservateur. Au moment de sa
nomination au Sénat par la gouverneure de l’État Nikki Haley, Scott venait tout
juste de remporter un second mandat comme représentant du premier district de
la Caroline du Sud à la Chambre des représentants. Selon les derniers sondages,
il serait en avance de près de 20
points sur son adversaire démocrate Joyce Dickerson. Scott s’intéresse particulièrement
aux questions d’immigration illégale qu’il associe étroitement aux enjeux de
sécurité nationale : « A
porous southern border is not just an illegal immigration issue, but should be
considered a threat to national security ».
Pour enrayer ce phénomène qu’il considère comme
un fléau, il se prononce en faveur du déploiement d’un nombre plus important
d’agents à la frontière, de la construction de murs frontaliers et préconise le
renforcement des systèmes de surveillance vidéo afin de faciliter le repérage des
immigrants illégaux.
William
Hurd
source : www.hurdforcongress.com |
Cet ancien agent de la CIA âgé de 37 ans fait campagne
contre le démocrate Pete Gallego pour remporter le siège de représentant du 23e
district du Texas. Cette
course s’annonce comme l’une des plus serrées.
Le Texas est reconnu pour avoir une des lois les plus restrictives concernant
le vote. En effet, les électeurs doivent fournir une pièce d’identité gouvernementale
pour avoir accès aux urnes. Plus de 600 000 Texans risquent ainsi d’être privés
de leur droit vote, dont la plupart sont issus de milieux défavorisés et sont par
conséquent plus enclins à voter démocrate. Afin de remporter cette course
électorale, Hurd surfe sur l’impopularité d’Obama dans son État, en assimilant notamment
son opposant aux politiques du président. Il bénéficie également du soutien de
Paul Ryan (ancien candidat à la vice-présidence et représentant du premier
district du Wisconsin) et du gouverneur du Texas Rick
Perry qui a vanté dans une publicité les mérites du jeune candidat.
Mia Love
source : ww.observer.com |
Étoile montante du Parti républicain, cette
jeune femme de 38 ans ne met pas sa couleur de peau au cœur de sa stratégie de
campagne puisque seulement 1% de la population de l’Utah est afro-américaine. D’origine
haïtienne, elle s’est convertie au mormonisme et affirme son attachement aux
valeurs familiales traditionnelles. Elle fut l’une des personnalités publiques les
plus remarquées de la convention républicaine de 2012. Après avoir échoué de
peu à se faire élire en 2012 malgré l’appui du Tea Party, Mia Love a pris ses distances avec ce mouvement
ultra-conservateur. Cette année, elle tente à nouveau sa chance afin de
remplacer le démocrate Jim Matheson, qui a annoncé sa retraite. Selon les
derniers sondages, elle serait en avance de 9
points sur son adversaire démocrate Doug Owens pour devenir la prochaine
représentante du 4e district de l’Utah.
Des victoires qui se révèleraient historiques
Les résultats des élections du 4 novembre
prochain pourraient se révéler historiques. En effet, si Tim Scott est élu, il serait
le premier sénateur Afro-Américain républicain du Sud élu à Washington. William
Hurd quant à lui, serait le premier
représentant noir républicain de l’histoire du Texas. Enfin, Mia Love deviendrait
la première femme noire républicaine à siéger au Congrès. De plus, ces trois
personnalités représentent des franges de la société américaine que le Parti
républicain peine à séduire (les jeunes, les minorités ethniques et les
femmes). Ils constitueraient des atouts de poids que le GOP pourrait faire valoir en 2016 lors des prochaines
présidentielles.